Ménélaos Loudémis

(Istanbul, 1906 ou 1912 - Athènes, 1977)

De son vrai nom Dimitris Valassiadis. Bibliothécaire, il prit part à la Résistance dans les rangs de l’EAM. Déporté à Ikaria, Makronissos puis Aï-Stratis, de 1947 à 1955.

Mikis Théodorakis était déjà déporté lorsque Loudémis arriva à Makronissos. Quand il apprit sa venue, il se rendit aussitôt au débarcadère : « Je me suis assis sur un rocher pour regarder le petit groupe qui avançait avec son escorte. (…) Puis je vis un homme microscopique qui essayait de grimper le sentier abrupt. Il haletait et boitait [conséquence d’une blessure de jeunesse mal soignée, Loudémis était boiteux]. Derrière lui, un gendarme le bousculait. Mes yeux se troublèrent. Les mouvements de Loudémis s’atténuèrent, se dégageant de la matière, jusqu’à devenir ceux d’un papillon noir diaphane comme il palpite quand on l’épingle et qu’il agite frénétiquement les ailes au rythme de son agonie. Je ne vis pas Loudémis passer devant moi, et je ne l’ai jamais croisé dans le camp non plus. Notre rencontre s’est faite beaucoup plus tard à Bucarest, pendant la Junte des Colonels. Je le vis alors vivre et rire sous mes yeux. Et pourtant, rien n’a pu effacer cette première image de ma mémoire, celle du papillon noir qui haletait et palpitait sur le sentier abrupt de Makronissos. »

Au camp, il écrivit une série de poèmes, dont plusieurs sont dédiés à Myrto, sa fille de 3 ans. (Sa femme et sa fille, déportées à Chios puis Trikéri, avaient alors été libérées après avoir signé la « déclaration ». Exilée en Allemagne, sa femme lui écrivit pour lui annoncer le décès de leur fille. Ce n’est que bien des années plus tard qu’il apprit. ) En 1956, il fut transféré à Athènes afin d’être jugé pour haute trahison à cause de son roman Jours bourbeux qui, selon l’accusation, faisait la propagande de dangereuses idées. À la question du juge lui demandant pourquoi il n’avait pas signé la « déclaration » qui lui aurait permis de rejoindre les siens, il répondit : « Il a fallu des millions d’années pour que l’homme avance sur ses deux pieds, je n’allais pas, moi, le remettre à quatre pattes. ». À la suite de ce procès, ses livres furent interdits en Grèce. Il s’expatria en Roumanie en 1958, et perdit sa nationalité grecque en 1962. Il revint en Grèce en 1976.

Il figure parmi les auteurs les plus lus en Grèce. Il a écrit près de cinquante livres, traduits en de nombreuses langues : poèmes, nouvelles, théâtre, biographies, essais, livres pour enfants et romans.