12/06/2024
« Alejandra Pizarnik, la poétesse météore », par Marie Richeux
Trente-six ans de vie et 15 ans de poésie : tel fut le destin du « météore », Alejandra Pizarnik. Pour lui rendre hommage et à l’occasion de la parution d’une biographie et du second volume de ses œuvres complètes, nous recevons la poétesse Liliane Giraudon et la spécialiste de son œuvre Ana Becciu.
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Née en 1936 à Avellaneda en Argentine, Flora Pizarnik, choisit son troisième prénom, Alejandra, pour aller dans le monde, vivre une vie trop brève, celle d’une météorite débordant de désirs, jusqu’à sa mort en 1972. Elle laisse une œuvre immense, quantité de textes inédits, que la maison d’édition Ypsilon entreprend d’éditer depuis plusieurs années. Un nouveau volume de ces œuvres vient de paraître, l’occasion pour le Book Club d’évoquer la poétesse avec deux autrices, elles-mêmes poétesses, qui l’aiment et connaissent son œuvre, Liliane Giraudon et Ana Becciu.
La note vocale
La question d’Aline à nos invitées : « J’ai rencontré Alejandra Pizarnik il y a un petit peu plus d’un an maintenant, et ça a été un coup de foudre. En découvrant ces textes poétiques, j’ai rencontré une personne, en plus de rencontrer une œuvre. J’ai la sensation que ça tient principalement au fait qu’elle a une écriture extrêmement sensuelle, presque physique et elle laisse transparaître dans ses mots une personnalité très complexe, très contradictoire, très intense. En fait, il y a toutes les contradictions dans ses mots. On sent une grande recherche formelle et en même temps une fulgurance, une volonté d’ouverture sur le monde et une plongée dans la plus grande des noirceurs de l’âme. C’est quelque chose de très magnétique, qui, d’ailleurs, se confirme à la lecture de son journal. Alors, Je voulais savoir comment lire et recevoir son journal aujourd’hui, parce qu’il est intime, certes, mais c’est aussi une création poétique ? »
Liliane Giraudon et Ana Becciu expliquent : « Je vous remercie pour votre lecture, parce que qu’elle est incroyablement juste. Qu’est-ce qu’on peut dire ? On peut dire que son journal est à la fois le complément du poème mais, il ne s’en sépare pas, parce qu’à l’intérieur même de la prose, de ce qui s’appelle le journal intime, on retrouve le rapport à la langue, à la prosodie, au choix des mots, au rythme, et à la ponctuation. Ce qu’on peut dire également, c’est qu’elle écrivait dans ses cahiers comme lors d’un atelier d’écriture. On y trouve souvent des phrases qui sont écrites d’abord dans son journal et qu’on retrouve après dans quelques-uns de ses poèmes transformées ou identiques. Alejandra Pizarnik effectue une sorte de prélèvement et de remontage, et elle fait la même chose avec les poètes étrangers. C’est pour ça qu’on peut retrouver une phrase de Rimbaud, ou un morceau de phrase de Nerval, qu’elle se réapproprie de manière un peu cannibale. »