Le 21 avril 1967 en Grèce : coup d’Etat des Colonels. Yannis Ritsos est arrêté le matin même et conduit à la Sûreté puis à l’hippodrome de Phaliro où sont parqués les dix mille otages de la Junte. À la fin du mois, ils sont envoyés par navire militaire sur l’île de Yaros, un grand rocher sans arbre et sans eau, infesté de rats. Pierres.
En septembre, Ritsos est transféré sur l’île de Léros. « Là-bas, pendant nos interminables nuits, il écrivait sa grande poésie. Là-bas, il jetait des milliers de vers dans ses petits carnets », se souvient un de ses compagnons. Répétitions.
En août 1968, Ritsos, malade, est emmené sous escorte à Athènes, au centre anticancéreux. Quarante jours plus tard, il est de retour sur Léros. Fin octobre, il est transféré en résidence surveillée sur l’île de Samos, emportant avec lui les poèmes déjà écrits, cachés dans une valise à double fond. Aucun lien ni contact ne lui sont autorisés. Répétitions, Grilles.
En 1969, il parvient à envoyer clandestinement ses minuscules manuscrits à Paris.
Pierres Répétitions Grilles est traduit en français pour la première fois dans son intégralité, puisque 84 poèmes (17 pour Pierres, 48 pour Répétitions et 19 pour Grilles) manquaient à l’ensemble des 73 poèmes édités en 1971 par Gallimard, quand ils étaient « inédits encore dans leur propre langue ». Dans la préface, Aragon écrivait : « Je ne savais pas d’abord de lui qu’il était le plus grand poète vivant de ce temps qui est le nôtre. Je l’ai appris par étapes, d’un poème à l’autre, j’allais dire d’un secret à l’autre ».